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Juan est un jeune maton. Par zèle, il visite la prison un jour avant son affectation. Sa bonne volonté ne sera par récompensée : c’est justement ce jour-là que les prisonniers du Quartier de Haute Sécurité ont choisi pour organiser une mutinerie. Une seule chance de survie s’offre à lui : se faire passer pour un prisonnier nouvellement incarcéré.
"Au pays des lèche-cul, les fayots sont rois" affirmait encore il y a peu Stephane Bern au cours d’un repas princier riche en haricots (princesses, eux aussi). S’il existait une compétition officielle du fayotage, Juan Oliver tiendrait incontestablement la tête de la ligue. Ce futur gardien de prison décide de son plein gré de rendre une petite visite à ses compagnons de travail alors qu’il n’est censé commencer que le lendemain. Une manière de tâter le terrain et de s’imprégner de l’atmosphère. Pour son premier non-jour de travail, le maton est bien reçu : il se retrouve coincé au sein d’une mutinerie et tente de convaincre les taulards bodybuildés malintentionnés qu’il est un nouveau détenu. Un des leurs en somme. Plongé au coeur de l’enfer carcéral, Juan ne doit jamais relâcher son élan d’interprétation, sous peine de sentir s’insinuer entre ses fesses des éléments étrangers ou, pire, de faire la rencontre de la Faucheuse en personne...
Cellule 211, présenté cette année au BIFFF dans la catégorie Thriller, faisait office de sérieux outsider eu égard du nombre de Goyas (les Oscars espagnols) remportés par le film de Monzon (huit statuettes dont celle de Meilleur film et Meilleur acteur pour Luis Tosar, exceptionnel dans le rôle de Malamadre). Le jury ne s’y est d’ailleurs pas trompé en l’élisant dans sa catégorie et en lui décernant le Prix Michel Devillers du Meilleur Thriller. Thriller carcéral en l’occurrence, ce qui permet au film de flirter, du moins thématiquement, avec le multi-césarisé Un prophète, Animal factory, les séries Oz et Prison break ou encore le récent Stoic d’Uwe Boll présenté l’année passée sur les terres bruxelloises. Le métrage de Daniel Monzon (The Kovak box) tire le meilleur du genre duquel il se revendique, recourant aux indispensables ingrédients du thriller pénitentiaire : tension graduelle, guerre des clans, règne de la violence, décors sinistres et dénudés stigmatisant les difficiles conditions de vie des détenus.
Réalisé avec une étonnante sobriété, Cellule 211 se démarque des
rebondissements outranciers de la série Prison break en privilégiant une trame plus modérée, pour l’essentiel centrée sur les personnages qui cohabitent contre leur gré et ne sont animés que par l’instinct de survie et l’envie de domination. Au sein de ce foutoir, Juan (campé par Alberto Ammann) se laisse doucement porté par les moeurs de ses congénères, franchissant les limites de sa propre moralité sitôt que les événements de l’extérieur viennent le heurter. S’enclenche dès lors une captivante lutte d’influence entre le pseudo-criminel, le vilain petit taulard en chef, surnommé Malamadre (littéralement : comment je ferais mal à ta mère) et ses hommes de main.
En arrière-plan de ce thriller haletant se dessine un intéressant tableau de la réalité politique du pays via les tensions liées aux membres de l’ETA. Ce qui donne encore davantage d’explosivité à cette bombe pelliculée.
Tout auréolé d’un succès sans précédent aux Goya Awards, où il a remporté pas moins de 8 récompenses, Cellule 211 est sans aucun doute le film espagnol de l’année. Présenté lors du BIFFF 2010 avant une timide exploitation en salles, le métrage de Daniel Monzon fait d’ores et déjà office de film de zonzon indispensable et, d’un point de vue tout ibère, rivalise avec les énormes et nombreuses grosses cylindrées du genre. Celda 211, de son titre original, est basé sur un roman de Francisco Pérez Gandul
auteur largement primé de la péninsule australe de l’Europe. L’adaptation du récit d’origine, signé par le génial Jorge GuerricaechevarrÃa (aide de camp favori de de la Iglesia et par Monzon lui-même, suit Juan, un futur jeune maton. La veille de son embauche, en vue de se faire bien voir, le jeune homme se rend à la prison pour la visiter et faire connaissance avec ses futurs chefs. Mal lui en a pris : alors qu’il est blessé par la chute d’un objet, une mutinerie éclate dans la zone de Haute Sécurité. Dernière chance de survie pour lui : se faire passer pour un prisonnier au milieu de bêtes bien plus sauvages que lui…
Véritable succès en Espagne, l’un des eldorados les plus inventifs du cinéma mondial, Cell 211 confirme les excellents échos à son égard dès les premiers instants. Proche de ses protagonistes, et plus particulièrement du héros, Monzon instille un caractère particulièrement humain au récit qu’il fonde de fort belle manière. Bien aidé par le travail d’adaptation de GuerricaechevarrÃa, le cinéaste se livre même, dès le début, à un montage croisé laissant entrevoir les événements de différents points de vue. Sans se montrer répétitif pour autant, Cell 211 présente alors une intrigue aussi simple qu’elle n’est complexe au niveau de ses personnages.
Entre Juan, le maton, véritable pierre angulaire du récit, incarné de manière sobre par Alberto Ammann, et Malamadre véritable bête sauvage qui profite d’un traitement psychologique particulièrement fin, Monzon construit un récit fait de rebondissements et bénéficiant d’un crescendo de violence assez impressionnant. Si l’action ne manque guère, c’est avant tout au niveau émotionnel que le film frappe dans sa seconde partie, les bases jetées parGandul étant répercutée aussi fidèlement qu’intelligemment. Malgré certaines imperfections au niveau du sous-texte (les prisonniers de l’ETA n’étaient guère nécessaires mais vraiment vendeurs en Espagne…), Monzon parvient à tenir le spectateur en haleine de bout en bout avec un huis-clos qui prend directement aux trippes.
Adaptation particulièrement intelligente d’un récit qui l’était tout autant, Cellule 211 constitue LA pépite espagnole de l’année et pourrait même s’imposer dans la légende comme l’un des films phares de zonzon. La superbe mise en scène de Daniel Monzon, alliée au talent de comédiens convaincants, font de Cellule 211 une œuvre pleine et émotionnellement très éprouvante.
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