Cinemafantastique vous propose une critique jeune des films les plus vieux au plus récents traitant du fantastique dans sa globalité. Horreur, gore, fantômes ...
La première enquête d'un policier débutant, qui va devoir faire des choix d'une importance majeure.
Depuis plusieurs années, le cinéma indien se semble soucieux de se débarrasser progressivement de ses oripeaux bollywoodiens qui rendent chaque production de l’industrie directement identifiable, ce qui s’avère être, à l’international, autant un atout qu’un désagrément. A mille lieues des mises en scène fastueuses, des décors bariolés et des chorégraphies lascives derrière un chanteur aguerri au play-back s’épanouit donc un cinéma alternatif, empruntant davantage son esthétique et son style aux cinématographies sud-coréenne, américaine ou japonaise, de tendance bad-ass. Gangs of Wasseypur illustrait l’an passé cette volonté de dépasser le cadre rose-bonbon de Bollywood en transplantant au cÅ“ur de l’Inde une intrigue toute scorsesienne (des mafieux, des règlements de compte, des tatanes pour une Å“uvre au noir littérale). Avec Moonsoon shootout, présenté en séance de minuit au festival de Cannes, Amit Kumar semble prendre le même modèle ricain en dépeignant une violence âpre et contagieuse, des forces de l’ordre plongées dans le dilemme de l’honneur et du pot-de-vin et une jeune recrue, remplie d’illusions, qui perd son innocence au contact de ces brutes épaisses, mafieuses ou policières.
De dilemme, il en est justement question pour Adi, ce jeune bleu de la police de Bombay, qui participe à une mission pour coincer le bras droit d’un des parrains de la pègre locale. Sous des pluies diluviennes, il se lance à sa poursuite dans les ruelles sombres de la ville et, au détour d’une énième venelle, le tient en joue de son arme. Mais il hésite, durant ce quart de seconde, sur la solution : doit-il tirer sans sommation sur cet homme désarmé ou tenter de l’arrêter ?
De ce point cas de conscience découlent des conséquences diverses, chacune prenant vie à l’écran et entraînant son lot de souffrances, de désillusions, de violences. Car, fidèle à sa propre conception et à celle de son producteur (Anurag Kashyap, auteur de Gangs of Wasseypur et Ugly, également présenté au festival), Amit Kumar ne se cantonne par à reprendre les codes du polar et à les greffer au corps policier indien : il utilise le prisme du genre pour disséquer de l’intérieur l’institution et en révéler les dysfonctionnements (corruption, méthodes d’intimidation), sans atteindre ni le réalisme ni la noirceur des polars de Scorsese et de Kim Jee-woon.
D’autant qu’une fois que les rouages scénaristiques se mettent en marche, ils montrent d’emblée la fragilité de leur mécanique, aux intentions hautement prévisibles puisque serinées dès l’entame par la mère du héros : "Il y a trois chemins : le bon, le mauvais et le tien". Reste à savoir qui remportera la donne dans ce polar aux allures de western en pleine mousson : le bon, la brute ou le truand...